Le martyrologe est le livre liturgique des anniversaires des martyrs, et par extension des saints en général, des mystères et des évènements qui sont susceptibles d’une commémoration annuelle dans l’Église universelle.
On sait qu’aux premiers siècles de l’histoire de l’Église les Actes des Martyrs étaient en possession, dans plusieurs églises, particulièrement en Afrique, d’une dignité liturgique officielle. On les lisait publiquement, le jour anniversaire de la mort des martyrs, à la messe solennelle.
En ces temps le martyre n’était pas une exception, mais une menace et une promesse pour tous les fidèles. Le martyre était la perfection de la charité ; par ces lectures, officielles, on s’y préparait par la réformation physique et morale des chrétiens, soumis à une sorte de préparation et d’ascèse, qui paraît même avoir fait l’objet d’une rédaction officielle. Dans ces conditions, le récit du combat de ceux qui avaient triomphé prenait leur place dans la formation morale de la société chrétienne, et une place d’une importance considérable. La plus ancienne attestation en est la lettre des chrétiens de Smyrne sur le martyre de leur évêque Polycarpe, le 23 février 165.
Les conditions politiques nouvelles amenées par la paix de l’Église, après 313, laissèrent au martyre sa dignité éminente et surnaturelle, son attrait mystérieux et austère et sa valeur absolue : l’instrument par le moyen duquel chaque martyr a consommé son sacrifice est une parcelle de l’autel sur lequel le Christ est immolé, et chacune de ces parcelles, en venant s’ajouter à la croix de Jésus-Christ, achève de parfaire « ce qui manque à sa passion ».
Comme dit le cardinal Journet : « Le culte chrétien est identique à travers les âges à cause de la présence même du Christ qui agit à travers ses membres pour le perpétuer : toujours il reste le même, toujours il consiste à donner une sorte de pérennité aux gestes de Jésus. »
Les Actes des Martyrs sont la transcription exacte, ou à peu près, des procès-verbaux judiciaires dressés par les païens et vendus aux fidèles par les agents du tribunal. Ainsi l’existence et la pureté des sources primitives sont assurées. Il n’est qu’à consulter les transcriptions des comptes-rendus de jugements faits lors des innombrables exécutions des chrétiens de la Révolution française.
Les pièces mises aux archives y étaient conservées indéfiniment. Nous sommes aussi redevables à la ferveur des fidèles des copies parvenues jusqu’à nous. Ceux-ci ne reculaient devant aucun sacrifice ni aucun péril pour se procurer la transcription des actes. Les églises se servaient de ces procès-verbaux pour toucher les infidèles et affermir les frères. Les païens le savaient et s’efforçaient de s’opposer à cette propagande. On connaît la fameuse lettre des martyrs de Lyon ; de même les Passions de sainte Perpétue, ou de saint Saturnin qui sont des modèles achevés.
Peu à peu, le prix que l’on attachait à la possession du récit authentique du combat des martyrs, l’usage que l’on en faisait dans la liturgie à des offices et à des jours déterminés, imposa l’adoption d’un classement qui donna naissance à des collections de récits. Une Collection établie par Eusèbe, au IIIème siècle, a servi à établir un document hagiographique fort précieux, le martyrologe d’Asie Mineure. Lequel servira de base au Martyrologe hiéronymien, au Vème siècle, dont on possède encore un fragment du VIIIème siècle. Ces brèves notices servaient sans doute de lecture ascétique dans les monastères. Peut-être aussi existait-il un livre liturgique spécial, une sorte de martyrologe-lectionnaire, au moins dans certaines églises.
Adon, archevêque de Vienne (au milieu du IXème siècle), rassembla partout où il put les atteindre les actes des martyrs dont il tirait un court résumé pour l’insérer dans la compilation du martyrologe qui porte son nom. Cette pratique nous met sur la trace d’un livre liturgique composé suivant la même ordonnance que le martyrologe et comprenant le texte intégral des actes dont le martyrologe ne donnait qu’un abrégé. Le chant du martyrologe au chapitre de Prime dans les monastères, a été fixé au concile d’Aix-la-Chapelle en 816.
Ce n’est qu’à partir du Concile de Trente que le martyrologe romain, promulgué en 1584, devient un livre liturgique officiel pour toute l’Eglise. Une nouvelle version révisée et mise à jour est parue en 2004. C’est ce texte dont nous donnons une traduction libre et un peu complétée, adaptée au propre de l’Abbaye de Notre-Dame de Randol et du diocèse de Clermont.