Spiritualité

I – Une vie chrétienne:

Fondée sur la foi, l’espérance, et la charité. Nous les avons reçues au baptême. Le baptême est un événement extraordinaire qui se donne au nom de la Trinité tout entière. C’est une semence, un germe de vie divine.Tout l’effort de notre vie sera de conserver, de développer, de faire fructifier cette semence. Nous voulons ouvrir toutes grandes les portes à Dieu et à la grâce, pour atteindre la sainteté.
Vatican II parle « d’une vocation universelle à la sainteté », qui n’est donc pas réservée aux prêtres et aux religieux puisque de nombreux laïcs ont été canonisés.

II – Une vie religieuse:

Dont le but est de faire croître cette semence le plus rapidement, le plus sûrement possible.
C’est une marche vers Dieu par la route la plus rapide et la plus sûre.
Le moine doit donc se rendre libre et, pour ce faire, ne pas s’encombrer de bagages, prendre les chemins de traverse. C’est pourquoi il fait trois vœux.

Les trois vœux :

1- Le vœu de pauvreté : ce n’est pas la recherche d’une vie de misère mais un renoncement à ce que l’on possède : « Va, et vends tout ce que tu as…. » dit l’Évangile.
Le vœu de pauvreté est un sacrifice mais c’est surtout une libération : quand il perdait ou cassait quelque chose, saint François de Sales avait l’habitude de dire : « Ah ! Encore une chose dont je n’aurai pas à me détacher au moment de la mort. » »
Le vœu de pauvreté est donc un attachement plénier à Dieu.

2- Le vœu de chasteté : c’est le renoncement au mariage, à la famille, à ses joies légitimes.
« L’homme qui est marié a souci des affaires du monde, cherche à plaire à sa femme ; et le voilà partagé. L’homme qui n’est pas marié a souci des affaires du Seigneur, des moyens de plaire au Seigneur. » (1 Co 7, 32 34)
D’après Dom Delatte, « la perfection du vœu de pauvreté consiste à n’être riche que de Dieu; la perfection du voeu de chasteté, à n’avoir d’affection que pour Dieu et selon lui. »

3- Le vœu d’obéissance : est le renoncement à notre bien le plus encombrant : notre propre volonté.
D’où une libération totale en nous livrant à la volonté de Dieu manifestée par un supérieur.
Mais il y a là un paradoxe : comment être libre en obéissant ? :
Pour prendre une image : la truite ou le milan royal, que l’on voit à Randol, sont libres quand ils sont dans leur élément ; l’eau pour l’une, l’air pour l’autre. L’homme est libre quand il est dans son élément : quand il vit pour accomplir ce que Dieu a prévu pour lui.
Le religieux, le moine, quand il vit pour accomplir ce que Dieu a prévu pour lui, conforme sa volonté à la volonté de Dieu signifiée, manifestée par la règle écrite et par un supérieur, règle vivante.
« L’obéissance immédiate est le propre de ceux qui n’ont rien de plus cher que le Christ. »
Le service sacré qu’ils ont voué, la crainte de l’enfer, la gloire de l’éternelle vie, TOUT les détermine dès qu’un ordre a été donné par un supérieur, à souffrir nul retard dans l’exécution, comme s’il émanait de Dieu lui-même.
« L’obéissance à l’ordre donné emboîte pour ainsi dire le pas de celui qui commande; et comme en un même instant, l’injonction du maître et sa pleine réalisation par le disciple s’accomplissent toutes deux à la fois, immédiatement, dans l’élan et la crainte de Dieu, tant les presse l’ardent désir de parvenir à la vie éternelle. » (Règle de saint Benoît Ch. 5)
Le religieux, le moine, a voulu librement ce sacrifice. Il le ratifie librement chaque jour par tous ses actes. Son obéissance n’est pas celle d’un robot, elle est responsable : il doit rendre compte à son supérieur de l’accomplissement de ce qui lui a été donné à faire.

Par les vœux prononcés, le religieux est entièrement consacré à Dieu comme un calice. Tout entier attaché à Dieu, voué à son culte. C’est la réalisation du but essentiel de la création : Dieu nous a créés pour le connaître, l’aimer et le servir.
Tous les religieux ont ce même but : tendre à la sainteté et par une consécration totale.
Mais il y a plusieurs formes de vie religieuse.

III – Une vie contemplative :

– Les religieux actifs ont un but premier : chercher la sainteté, faire de leur vie un don à Dieu ;- ils ont un second but, subordonné au premier : la prédication, l’engagement, les missions, le soin des malades. Les religieux actifs assurent le service du Christ dans le prochain.
– Les religieux contemplatifs ont un seul but : – vivre pour Dieu dans le Christ Jésus. Dieu est maître des vocations. Il attire au désert pour parler dans le cœur à cœur. Les contemplatifs sont au seul service de Dieu. Dieu veut qu’en toutes choses, ils le glorifient. La vie contemplative est un acte de charité envers Dieu. C’est aussi un acte de justice : un acte de reconnaissance de l’absolu, de la transcendance de Dieu, une conscience de l’amour de Dieu qui mène à la consécration totale.
Les religieux contemplatifs seraient-ils inactifs ? Les religieux actifs servent l’Église ; c’est facile à constater. Leur bouche sert à la prédication, leur bouche et leurs pieds servent aux missions, leurs mains au soin des malades. Les contemplatifs aussi ont leur place dans l’Église : Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, patronne des missions, disait : « Ma vocation, enfin, je l’ai trouvée. Dans le cœur de l’Église, devise de Randol, je serai l’amour. » Les contemplatifs sont au cœur de l’Église. Comme une centrale électrique, Randol a, dans toute l’Église, un influx invisible, dans le secret de Dieu. Selon Vatican Il, l’évangélisation d’un pays de mission est achevée quand une communauté de contemplatifs y prend naissance.

IV – Une vie monastique :

Une vie contemplative séparée du monde. Les textes qui viennent d’être cités montrent la nécessité de la retraite. « Moine » vient de « monachos » « monos » veut dire seul, unique, simple.
– Seul : la solitude est nécessaire à la contemplation comme le Christ était seul au désert. Randol est situé en pleine nature. Le monastère est entièrement conçu pour faire monter vers Dieu. Ses corollaires : la clôture, un signe matériel et spirituel; l’habit, signe de séparation et de consécration; le silence, indispensable à la contemplation; la cellule, espace de contemplation.
– Unique : une vie unifiée autour de l’appartenance exclusive à Dieu. Pas de diversion, pas de partage.
– Simple : parce qu’elle est unifiée autour de l’Unique Nécessaire.

V – Une vie bénédictine :

C’est une vie monastique avec des caractères qui lui sont propres : une vie de prière et de travail : – « ora et labora » dit-on, dans une famille.

Ora (la prière) :
– La prière privée : « et quand tu pries, retire toi dans ta chambre… » C’est une prière de toute la journée. Toutes les activités sont sanctifiées par la prière.
– La prière communautaire : « Lorsque vous serez réunis deux ou trois en mon nom, je serai au milieu de vous. » Les deux formes de prière sont interactives : elles se nourrissent mutuellement. Mais il y a toujours le primat de l’Office liturgique, de l’Opus Dei. Les moines sont réunis à l’église huit fois par jour : le Christ est là, le Christ prie en eux et par eux.  Ils ne disent pas 40 prières individuelles juxtaposées, mais la prière du Christ, la prière officielle de l’Église, la prière au nom de l’Église. Son centre est la Messe conventuelle. Les huit offices couronnent la Messe comme des rayons de soleil. « La Messe, c’est toute ma vie ; et toute ma vie est une Messe. » (P. Olivain, jésuite, martyr au temps de la Commune). C’est pourquoi, à Randol, le chœur des moines se trouve entre le maître-autel et le Saint Sacrement. Les moines sont la garde d’honneur du Saint Sacrement.  Les petites heures sont faites pour nous replonger dans la présence de Dieu et l’emporter au milieu de nos occupations comme des oraisons jaculatoires.  Alors la prière privée et la prière communautaire sont unies en une prière continuelle : « Le pivot autour duquel tourne la journée du moine. La prière faite dans une liturgie se transfère dans la vie, et la vie elle-même devient prière » (Jean Paul II)

Labora (le travail) :

– Le travail manuel : c’est une nécessité pour vivre et pour rester en clôture, c’est un moyen de pénitence, c’est un facteur d’équilibre, c’est une contribution à la création, ce qui est particulièrement vrai à Randol.
– Le travail intellectuel ou plutôt l’étude des choses divines, la lectio divina. Elle a pour but de connaître pour aimer, de s’imprégner de Dieu d’abord par l’Écriture Sainte car l’homme ne vit pas seulement de pain. « Quand tu pries, tu parles à l’époux ; quand tu lis, c’est lui qui te parle » (Saint Jérôme). La lectio divina permet de s’habituer à contempler l’invisible. « La lecture alimente la prière, la suppose, se confond presque avec elle » (Commentaire de Dom Delatte sur la Règle de saint Benoît)
… dans une famille. Les moines ne forment pas seulement une communauté mais une famille – la forme de vie la plus naturelle. La plus surnaturelle aussi selon le modèle de la Sainte Trinité. On entre dans cette famille par la Profession monastique. Le vœu de stabilité signifie que l’on entre dans une famille stable dont on est le fils pour toujours. Cette vie fraternelle est un grand soutien dans la vie monastique. Nous connaissons la joie d’une famille dont le père de famille est l’abbé à vie. C’est ce que nous nous efforçons de vivre à Randol, c’est-à-dire de former, selon les paroles de Paul VI : « une petite société idéale, où règne enfin l’amour, l’obéissance, l’innocence, la liberté à l’égard des choses et l’art d’en bien user, la prédominance de l’esprit: en un mot la Paix, l’Évangile »